mercredi 4 juin 2008

Mon petit grain de sel...

Après quelques jours de silence (quelque peu mérités), je reviens sur la planète blog alors que l'actualité et plutôt chargée.

Je ne parle pas de Gaël Manièce (pardon, Monfils) qui est devenu un autre homme, un autre joueur de tennis depuis qu'il ne joue plus qu'à 4h30 de playstation par jour (contre 5 auparavant), comme quoi, la victoire tient parfois à peu de choses.

Je veux parler de la décision du tribunal de grande instance (TGI pour les intimes) de Lille, décision d'annuler un mariage parce que la mariée n'était pas vierge.
Enfin c'est ce que l'on entend partout, aussi bien des journaliste "sérieux" que des professionnels du pas-content-isme. C'est ce que l'on entend partout, donc, mais ce n'est pas forcément la vérité.

Dans ce cas, ce que l'on entend est même très loin de la réalité. La vérité est que (quasiment) personne n'a rien compris à cette histoire.

Que disent tous ces gens ? Que le mariage a été annulé parce que la mariée n'était pas vierge. Circonstances aggravantes, les mariées sont de confession musulmane, ce qui fait que l'on entend crier au loup de l'obscurantisme, du retour en arrière, de l'abaissement de la condition de la femme, etc.
Que dit le jugement ? Que la femme a menti à son futur mari sur sa virginité, pas qu'il fallût qu'elle soit vierge pour être mariée.

Comme souvent dans les affaires passionnées comme celles-là, rares sont ceux qui prennent le risque de revenir aux faits. Monsieur X veut se marier avec mademoiselle Y. Monsieur X attache beaucoup d'importance au fait que sa future épouse ait encore son hymen le jour des noces. Il le dit et le répète à mademoiselle Y, mademoiselle Y lui affirme que sa fleur est toujours là. Ce n'est pourtant pas le cas, or elle lui affirme que si, et c'est là que réside le problème.
Le droit français parle de "qualités essentielles" des futurs époux dans l'article qui parle d'annulation du mariage. Que sont-elles ? Le droit ne le dit pas, libre à chacun de poser ses conditions. En aucun cas la virginité n'est une qualité essentielle pour se marier aux yeux du droit français, seulement (dans ce cas) aux yeux de monsieur X.

Dans cette affaire, ce n'est pas la virginité qui est importante, c'est le fait que mademoiselle Y a menti en connaissance de cause à monsieur X, et qu'il a accepté de l'épouser sur la base de ce mensonge. Il y a eu tromperie, mademoiselle Y l'a reconnue et le TGI de Lille n'a pas vraiment eu à tergiverser... Si cette annulation n'avait pas été prononcée, les époux auraient sans doute demandé le divorce, ce qui aurait fait beaucoup moins de bruit.
Les gens qui hurlent à tout va à propos de cette affaire ne savent pas de quoi ils parlent.

Deux petites choses pour terminer.
Il est évident que la question de la religion est centrale dans cette affaire. Le fait que les mariés soient de confession musulmane et que ce soit la virginité de la femme qui soit en question a beaucoup servi à déchainer les passions de beaucoup de gens qui ont ainsi oublié d'aller voir les faits avant de parler au lieu de l'ouvrir et dire des conneries. Si les mariés avaient été athées et si c'était la virginité de l'homme qui avait été en question, le débat aurait été un poil différend.

Ensuite, le parquet de Lille vient de faire appel de la décision du TGI de la même ville, à la demande de Mm. Dati. Je suis là à deux doigts de m'énerver. Que l'on gueule à tout va contre une décision de justice que l'on a pas compris, passe encore. Mais que ce débat qui n'a pas lieu d'être justifie que la politique se glisse dans la justice une fois de plus, Non. Cet appel est idiot, stupide, motivé par de mauvaises raisons et ne va déboucher sur rien de bon. De plus, le fait que le pouvoir politique puisse diriger le pouvoir judiciaire de la sorte n'est vraiment pas une bonne chose.

9 commentaires:

Glaboin a dit…

Merci de rétablir la vérité sur cette affaire ! je me suis échiné à essayer de l'expliquer dans mon entourage, mais visiblement, personne ne comprend la différence entre annulation pour cause de non-virginité, et annulation pour mensonge... Du coup, je ferme ma grande G...

Yves Clément a dit…

Certes, mon cher snoow. il est facile de s'indigner, il est plus dur de réfléchir et d'analyser les faits.

sacha a dit…

Ce que tu semble oublier, mon cher Yves, c'est que cette fille a eu mille et une chances de perdre l'hymen sans avoir connu d'homme pour autant... danse, gymnastique, équitation,... On disait bien au 19e que c'est le cheval qui prenait la virginité des filles nobles (sans aucune déviance sexuelle). De plus, si c'est de la virginité de l'homme qu'on parlait, la fille aurait bien du mal à prouver le mensonge (quoi, il a duré plus de trente secondes?!!! Il n'était pas vierge alors!)
D'où une certaines injustice quand même, tu ne trouves pas?

Yves Clément a dit…

je suis bien d'accord, sacha. il n'empêche qu'elle a reconnu avoir trompé M. X sur sa virginité, donc le problème n'est pas là.
Reste que la virginité féminine a souvent été utilisé contre les femmes par les hommes pour pouvoir les contrôler, ce qui peut expliquer la levée de boucliers que l'on a vu...

Yves Clément a dit…

Je me permet de rajouter ceci, lu sur un blog judiciaire très bien tenu (il n'y a pas que le blog d'Eolas qui soit bon...) et qui résume bien un de mes points de vu :
"Sanctionner ce mensonge qui porte sur la virginité de la mariée ne signifie nullement que la virginité des époux soit “une qualité essentielle” des futurs mariés au moment de s’unir par le mariage."
On en revient à ces fameuse "qualités essentielles" et à comment les définir. Personnellement, je ne crois pas que la justice puisse définir ce qu'elles sont, même concernant la virginité, il s'agit de vie privée.

Yves Clément a dit…

À lire donc :
http://jprosen.blog.lemonde.fr/2008/06/03/mariage-annule-persiste-et-signe-257/
http://jprosen.blog.lemonde.fr/2008/05/31/annulation-dun-mariage-le-cri-des-ex-vierges-256/

Glaboin a dit…

De plus, visiblement les deux ex-époux étaient tous les deux consentants pour annuler leur mariage. Le mensonge sur la virginité n'étant qu'un prétexte.
A posteriori, ils regrettent de ne pas avoir plutôt demandé un divorce par consentement mutuel.

Yves Clément a dit…

réponse par maitre éolas himself sur cette page:
http://www.maitre-eolas.fr/2008/06/05/973-eolas-vous-donne-du-grain-a-moudre

Yves Clément a dit…

Autre article interessant dans Le Monde cette fois :
http://www.lemonde.fr/opinions/article/2008/06/05/les-paradoxes-du-jugement-de-lille-par-anne-chemin_1054114_3232.html?xtor=RSS-3208